Au Québec, un travailleur ne peut pas être congédié à cause d’un accident de travail.
En fait, en cas d’accident de travail, le travailleur bénéficie d’une large protection qui empêche son employeur de le pénaliser.
Dans ce texte, nous expliquons comment un travailleur peut porter plainte lorsqu’il est congédié après un accident de travail, ou lorsqu’il est autrement pénalisé par son employeur.
Nous abordons également qu’elles sont les moyens de défense de l’employeur qui fait face à une telle plainte.
Voici la liste des sujets abordés :
La plainte du travailleur congédié à cause d’un accident de travail
L’article 32 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles prévoit qu’un employeur ne peut pas :
- Congédier
- Suspendre
- Déplacer
- Discriminer
- Faire des représailles
- Imposer une sanction
- Refuser de réintégrer
un travailleur qui a été victime d’une lésion professionnelle ou à cause de l’exercice d’un droit que lui confère la loi.
L’exercice d’un droit que lui confère la loi peut être, par exemple, exercer un droit de retour au travail, ou encore, contester une décision de la CNESST.
Structure C.Q.S. inc. et Guignard
La plainte du travailleur congédié à cause d’un accident de travail est aussi connue sous le nom de «plainte en vertu de l’article 32».
5 conditions à respecter
Le travailleur qui souhaite faire une plainte contre son employeur parce qu’il est congédié à cause d’un accident de travail, ou parce qu’il subit une autre mesure interdite, doit respecter les 5 conditions suivantes :
1) être un travailleur au sens de la loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles – Les sportifs professionnels, les dirigeant d’entreprise, et les domestiques, par exemple, sont excluent. |
2) avoir eu un accident de travail – ou avoir exercer un droit prévu par la loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles, comme le droit de retour au travail, ou le droit de contester une décision de la CNESST. |
3) avoir été congédié ou avoir subit une mesure administrative ou disciplinaire |
4) avoir fait la plainte dans les 30 jours du congédiement – sauf si le travailleur avait un motif raisonnable pour justifier son retard. |
5) avoir choisi de faire une plainte au lieu d’un grief – s’applique uniquement aux employés syndiqués. |
Par ailleurs, lorsque le travailleur rempli ces 5 conditions et qu’il fait sa plainte dans les 6 mois du congédiement, ou de la mesure interdite, c’est à l’employeur de démontrer que la cause du congédiement, ou de la sanction, n’est pas l’accident de travail.
L’employeur doit en fait démontrer que sa décision est justifiée par une «autre cause juste et suffisante». Nous abordons cette question un peu plus loin, dans les moyens de défense de l’employeur.
Comment faire une plainte en vertu de l’article 32 ?
Le travailleur qui souhaite faire une plainte contre son employeur parce qu’il est congédié à cause d’un accident de travail, ou parce qu’il subit une autre mesure interdite, doit le faire auprès de la CNESST après avoir rempli un formulaire de plainte.
En ligne
Le formulaire de plainte est disponible en ligne, à l’adresse suivante :
Une fois complété, ce formulaire doit être transmis à l’employeur et à la CNESST :
En ligne | MonEspace CNESST |
Par la poste | CNESST C. P. 1200, succ. Terminus Québec (Québec) G1K 7E2 |
En personne
Il aussi possible d’obtenir le formulaire de plainte, en personne, dans l’un bureaux de la CNESST :
Par contre, depuis la fin de l’année 2022, seulement 8 bureaux de la CNESST sur 28 sont toujours accessibles au publics, dans rendez-vous. Veuillez consulter cette publication avant de vous déplacer :
Qui juge la plainte en vertu de l’article 32 ?
La plainte du travailleur congédié à cause d’un accident de travail, ou parce qu’il subit une autre mesure interdite, est jugée par un employé de la CNESST qui est appelé un médiateur-décideur.
Comme son titre l’indique, cette personne offre d’abord une médiation entre le travailleur et l’employeur. Par contre, si ceux-ci ne souhaitent pas se soumettre à la médiation, ou en l’absence de règlement après une médiation, elle convoque les parties à une audience et elle rend une décision dans un délai 30 jours après cette audience.
Tant le travailleur que l’employeur peuvent se faire représenter par un avocat lors de cette audience.
Qu’est-ce qui se passe si la plainte en vertu de l’article 32 est accueillie ?
Le médiateur-décideur de la CNESST, lorsqu’il accueille une plainte soumis en vertu de l’article 32, peut ordonner :
- La réintégration du travailleur
- L’annulation de la sanction
- Que cesse les mesures discriminatoires ou de représailles
- Le versement du salaire et des avantages dont il a été privé
Versement du salaire
Le salaire auquel le travailleur a droit en cas de décision favorable de la CNESST, est celui auquel il aurait eu droit entre la date de sa capacité à retourner au travail, même en assignation temporaire ou progressive, et la date de l’exécution de la décision.
Par contre, on doit y déduire les sommes qui a pu obtenir d’un autre emploi ou à titre d’indemnité de remplacement de revenu (IRR).
L’IRR doit d’ailleurs être remboursé à la CNESST.
La CNESST peut imposer des intérêts sur le salaire et les avantages dues au travailleur.
Par ailleurs, l’employeur a 8 jours à partir du moment où il reçoit la décision écrite de la CNESST pour payer le travailleur.
Lorsque l’employeur ne paie pas les sommes dues au travailleur, celui-ci peut déposer la décision de la CNESST au Greffe de la Cour supérieure du palais de justice de la ville dans laquelle la décision a été rendue. Le simple dépôt de cette décision permet ensuite au travailleur de mandater un huissier pour l’aider à récupérer les sommes auxquels il a droit.
Dommages moraux et frais juridiques
Même si le travailleur obtient gain de cause et démontre qu’il a été congédié à cause d’un accident de travail, ou qu’il a subit une autre sanction, il ne peut pas obtenir de montant pour compenser ses dommages moraux. Il ne peut pas n’on plus obtenir le remboursement de ses frais juridiques.
Abouelella et Golf St-Raphaël (1998) inc.
Qu’est-ce qui se passe si la plainte en vertu de l’article 32 est rejetée ?
Lorsque la CNESST rejette la plainte du travailleur, celui-ci a 45 jours pour contester cette décision auprès du Tribunal administratif du travail.
Pour ce faire, le travailleur peut utiliser le formulaire en ligne disponible sur le site internet du Tribunal administratif du travail :
Le Tribunal administratif du travail décidera de la plainte sans prendre en considération la décision de la CNESST, comme si la plainte lui avait été soumise sans passer par la CNESST avant.
Les moyens de défense de l’employeur
Comme nous l’avons mentionné précédemment, lorsque le travailleur démontre que sa plainte remplie certaines conditions, l’employeur a le fardeau de démontrer qu’il mis fin à l’emploi du travailleur pour une ‘»cause juste et suffisante» qui n’est pas reliée à son accident de travail, s’il veut éviter que la plainte soit acceuillie.
La notion de «cause juste et suffisante» a été définie comme :
Une cause sérieuse, par opposition à un prétexte, et qu’elle constitue la cause véritable du congédiement
Exemples de causes justes et suffisantes
- Non-respect répété des règlements de l’entreprise ainsi que l’attitude et le comportement du travailleur lors d’une rencontre
- Menace de mettre le feu à l’établissement de l’employeur dans un excès de colère
Pépinière Jardin Floral inc. et Fournier
- Fausse déclaration du travailleur sur ses antécédents médicaux lors de l’embauche
- Ne possède pas les compétences et les habiletés requises pour occuper son emploi, et ne les a pas développées au cours de sa période probatoire
- Abolition de poste
8480001 Canada inc. et Guerrero Espinoza
Le rôle du Tribunal
Il est important de noter que ni le médiateur-décideur de la CNESST ni le Tribunal administratif du travail ne peuvent déterminer si le congédiement est une santion trop sévère ou injuste.
Leurs rôles se limitent à vérifier si le congédiement n’est pas simplement un prétexte pour se débarrasser d’un travailleur accidenté.
Lapalme et Viandes Col-Fax inc.
Entreprise de compétence fédérale
Enfin, le travailleur dont l’employeur est une entreprise de compétence fédérale, ne peut pas bénéficier de la plainte en vertu de l’article 32 après avoir été congédié à cause d’un accident du travail, ou lorsqu’il subit une autre mesure interdite.
Voici une liste des secteurs d’activités qui peuvent être considérés comme étant de compétence fédérale :
- Les télécommunications
- Les services postaux
- Les transport aérien et aéronautique
- Les transport ferroviaire
- Les transport par route interprovincial ou international