Logement

Les animaux de compagnie et le logement au Québec

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Alors que les animaux de compagnie ont déjà été considérés comme de simples meubles, ils ont acquis, dans les dernières années, un statut particulier.

La Loi sur le bien-être et la sécurité de l’animal mentionne d’ailleurs ce qui suit dans son texte introductif :

CONSIDÉRANT que la condition animale est devenue une préoccupation sociétale;

CONSIDÉRANT que les animaux contribuent à la qualité de vie de la société québécoise;

CONSIDÉRANT que l’espèce humaine a une responsabilité individuelle et collective de veiller au bien-être et à la sécurité des animaux;

CONSIDÉRANT que l’animal est un être doué de sensibilité ayant des impératifs biologiques;

CONSIDÉRANT que l’État estime essentiel d’intervenir afin de mettre en place un régime juridique et administratif efficace afin de s’assurer du bien-être et de la sécurité de l’animal;

En matière de logement, ces principes semblent s’appliquer depuis plusieurs années puisque que l’on permet à certains locataires de pouvoir avoir un animal de compagnie dans leur logement, et ce, même lorsqu’un règlement d’immeuble qui interdit strictement leur présence.

Il faut cependant que ces locataires respectent certaines conditions que nous allons vous présenter dans ce texte.

Par ailleurs, nous aborderons d’autres sujets en lien avec les animaux de compagnie et le logement, comme le nombre maximal d’animaux de compagnie qu’un locataire peut garder dans son logement.


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La présence illégale d’animaux dans un logement

Un locataire peut-il avoir un animal dans son logement même si le propriétaire et/ou le bail interdit les animaux ?

On répond à cette question, et on discute de zoothérapie.


La validité du règlement interdisant la présence d’animaux

D’abord, il faut savoir qu’un propriétaire peut interdire partiellement ou totalement la présence d’animaux dans un logement.

Il peut accepter tous les animaux ou accepter seulement un chien, ou même deux chats, par exemples.

Il n’est d’ailleurs pas rare qu’un propriétaire limite le poids ou la taille des chiens qu’il acceptent.

Tout ça est légal, en autant que ce soit prévu dans le bail ou dans le règlement de l’immeuble remis, lors de la signature du bail.

Il est maintenant bien établi que la clause d’interdiction de posséder un animal n’est pas en soi déraisonnable ni contraire à la Charte québécoise des droits et libertés de la personne.

Office municipal d’habitation c. Luce

Les recours du propriétaire

Lorsqu’un locataire ne respecte pas un règlement interdisant la présence d’animaux dans son logement, le propriétaire a deux (2) options.

Il peut demander un ordonnance au Tribunal administratif du logement afin de forcer le locataire à respecter le règlement, ou demander la résiliation du bail.

Par contre, la résiliation du bail ne sera possible que si la présence d’un animal lui cause un préjudice sérieux.

En présence d’une clause au bail interdisant la présence d’animaux, le locateur peut obtenir une ordonnance d’expulsion des animaux. Néanmoins, la seule contravention à cette clause ne peut soutenir une demande de résiliation de bail.

En effet, […] pour faire droit à la demande en résiliation présentée pour la contravention à la clause, le locateur doit prouver que cette situation lui cause un préjudice sérieux.

[…] Pour conclure à un préjudice sérieux, la preuve doit démontrer qu’il s’agit d’une situation grave et persistante impliquant des inconvénients excessifs.

Demers c. Guimond

Dans une affaire où un bail a été résilié à cause de la présence illégale de chats dans un logement, le Tribunal résume ainsi son raisonnement :

La preuve est prépondérante de la présence d’une odeur d’urine de chats nauséabonde dans le hall d’entrée et les escaliers de l’immeuble et qui pénètre dans le logement contigu du même étage.

[…]

Le locateur a démontré avoir reçu des plaintes à l’égard de cette odeur. Il a agi de bonne foi en laissant amplement le temps aux locataires de trouver une solution à l’odeur d’urine environnante, soit plus d’une année.

Le locateur doit gérer les plaintes des autres locataires et il est à risque d’une poursuite d’un des locataires vu les troubles de jouissance de leur logement, ce qui inclut les parties communes pour accéder à leur logement.

Le locateur a démontré que la présence des chats lui cause un préjudice sérieux et qu’au surplus, cette présence trouble sérieusement la jouissance des autres occupants de l’immeuble, les voisins des locataires.

Dans ces circonstances, la demande de résiliation du bail est bien fondée

Demers c. Guimond


La défense de zoothérapie

Le Tribunal administratif du logement a développé une exception en faveur des locataires, qui leurs permettent, lorsqu’ils remplissent certaines conditions, d’avoir des animaux même si c’est formellement interdit par un règlement.

Il s’agit de la défense de zoothérapie. Cette défense tire sa source de l’article 1901 du Code civil du Québec qui prévoit ce qui suit :

Est abusive la clause qui stipule une peine dont le montant excède la valeur du préjudice réellement subi par le locateur, ainsi que celle qui impose au locataire une obligation qui est, en tenant compte des circonstances, déraisonnable.

Évidemment, la tâche d’établir les circonstances qui rendent un règlement abusif revient au Tribunal administratif du logement.

À une certaine époque, ce Tribunal analysait les deux (2) questions suivantes :

  1. La présence de l’animal ne cause aucun trouble de quelque nature
  2. La présence de l’animal est nécessaire pour la santé ou la sécurité du locataire

Gestion Dynamique BM inc. c. Lessard

Dorénavant, le cadre d’analyse semble d’être resserré, et majoritairement, le Tribunal exige une preuve médicale précise et étoffée afin d’accueillir une défense de zoothérapie.

Ainsi, avant d’avaliser la présence d’un animal dans le logement à des fins de zoothérapie, il faut mettre en preuve une preuve médicale précise et étoffée

Habitations des rivières de l’Outaouais c. Aragon

 Il s’agit donc de voir si la preuve médicale soumise par la locataire est suffisamment étoffée pour justifier de déclarer la clause abusive à son égard, en tenant compte aussi des autres circonstances propres au présent dossier.

Foyer Hongrois inc. c. Varela

Afin de savoir ce qu’est une preuve médicale précise et étoffée, il faut encore une fois se tourner vers la jurisprudence qui distingue le simple compagnonnage du véritable besoin thérapeutique :

Sans le dire toujours clairement, la jurisprudence paraît faire une différence entre le simple compagnonnage d’un animal, qui ne justifie pas d’écarter la clause d’interdiction, et les besoins thérapeutiques d’un locataire (zoothérapie) qui, eux, justifient le décideur de le faire.

La ligne de démarcation entre les deux n’est pas toujours facile à tracer, notamment parce que la zoothérapie est une discipline en devenir, encore mal définie et non encadrée par le Code des professions.

Comme le mentionne avec prudence le psychiatre Poirier dans la présente affaire, la zoothérapie est un « traitement non spécifique qui peut avoir un effet positif chez des personnes présentant une situation d’isolement.

Par ailleurs, aucune étude formelle ou scientifique n’a pu démontrer cet état de fait. Il n’y a que des « cas clinique » qui ont pu permettre cette constatation. » 

Il faut donc examiner la preuve médicale disponible pour déterminer si le « portait médical » du locataire rend vraisemblable le besoin d’un animal à des fins thérapeutiques. 

 D.C. c. Berthierville (Office municipal d’habitation de )

Cette preuve n’est pas toujours évidente à faire comme le démontre ces deux (2) extraits d’affaires du Tribunal administratif du logement :

Dans le cas présent, la locataire ne fait pas cette preuve. Les rapports médicaux de 2018 soumis pour chacun de ses fils comportent deux mots « zoothérapie requise ».

Puis, quelques jours avant l’audience, de nouveaux rapports rédigés pour chacun des fils mentionnent : « Anxiété généralisée connue. Zoothérapie suggérée au patient, présence d’un chien est recommandée ».

Ces rapports laconiques sont insuffisants pour démontrer, de façon probante, la nécessité du chien à des fins thérapeutiques.

Les témoignages de la locataire et de son fils convainquent le Tribunal que la présence du chien a un impact positif pour les fils de la locataire.

Par contre, la preuve présentée ne persuade pas le Tribunal que ces bienfaits vont au-delà du bien-être général que confère le compagnonnage d’un animal.

Office municipal d’habitation de Lévis c. Guay

La locataire ajoute avoir besoin de son chien. Il est petit et ne dérange personne. Toutefois, la preuve soumise ne convainc pas le Tribunal de la nécessité d’un traitement de zoothérapie.

En cette matière, la jurisprudence majoritaire exige une preuve médicale précise et étoffée.

En l’instance, ce n’est qu’une fois le logement loué que la locataire consulte un médecin au mois de mai 2019 pour justifier la présence du chien dans le logement.

Il apparaît de la preuve qu’il semble s’agir d’un billet médical de complaisance pour soutenir le désir de la locataire de garder son chien.

Anjou 80 c. Pelletier-Desrosiers

Cette preuve n’est toutefois pas impossible à faire et la preuve médicale précise et étoffée n’est pas toujours requise pour que la défense de zoothérapie soit acceuillie comme en témoigne cet extrait d’une décision du Tribunal administratif du logement :

C’est ainsi qu’un locataire peut établir qu’une clause lui interdisant de garder un animal chez lui est déraisonnable au sens de l’article 1901 C.c.Q. en prouvant que la présence de son animal a une utilité thérapeutique (zoothérapie) et que l’application de la clause d’interdiction du bail lui causerait un préjudice affectif ou psychologique.

Les exemples foisonnent.

Ainsi dans l’affaire Coopérative de l’Ébène, en présence d’une preuve établissant que la privation de son chat causerait préjudice à la jeune fille aux prises avec des problèmes d’anxiété, la cour du Québec conclut que la clause d’interdiction est abusive.

Même résultat dans D.C. c. Berthierville (Office municipal d’habitation), où la cour du Québec permet au locataire de garder son animal parce qu’il « serait inapproprié et déraisonnable de le forcer à se départir de son chiot vu les conséquences néfastes probables sur son bien-être physique et mental ».

Soulignons que dans cette affaire, le juge Landry accepte comme preuve médicale un billet laconique d’un médecin énonçant simplement que le locataire doit garder son animal pour des fins de zoothérapie. Pour le paraphraser « tout aussi laconique soit-il, ce billet constitue néanmoins une preuve médicale ».

Dans un autre cas similaire, l’affaire Bilodeau c. Chabot, la cour du Québec mentionne que dans le cadre d’une demande fondée sur l’article 1901 C.c.Q., la possibilité pour un tribunal de juger une obligation déraisonnable pour un locataire ne se limite pas au cas où il existe une preuve médicale, mais peut tenir compte de l’ensemble des circonstances mises en preuve devant lui.

Il importe également de référer à Berniqué dans laquelle la cour du Québec renverse une décision de notre Tribunal ayant ordonné à une locataire de se départir d’un lapin qu’elle garde depuis dix ans chez elle malgré une clause du bail qui le lui interdit.

Dans cette affaire, le juge Claude Montpetit rejette une application systématique de la clause restrictive et écrit que le Tribunal administratif du logement peut tenir compte, dans le cadre de l’examen d’une demande d’exonération fondée sur l’article 1901 C.c.Q, de toutes les circonstances entourant la possession de l’animal comme le bien-être et le réconfort qu’il procure à son maître et le préjudice affectif et psychologique qui découlerait de l’obligation d’avoir à s’en départir.

La soussignée applique cette approche au cas sous étude, d’autant que la preuve documentaire, dont le billet du médecin exhibé durant l’audience et produit sous la cote P-5, conjugué au témoignage crédible du locataire Arsenault, suffisent à convaincre de manière prépondérante de sa condition médicale et des liens bienfaisants existant entre lui et son chat Cachou à des fins thérapeutiques.

Après analyse, le Tribunal conclut que priver le locataire de son chat Cachou serait le priver d’un lien affectif qui lui apporte des bienfaits évidents et du réconfort en raison de sa condition médicale particulière. Cela va bien au-delà du simple fait de posséder un animal de compagnie.

Duhamel c. Arseneault


Combien d’animaux un locataire peut-il avoir dans son logement ?

D’abord, il faut savoir qu’un propriétaire peut totalement interdire la présence d’animaux dans son immeuble, ou l’interdire partiellement.

Il n’est donc pas rare que des propriétaires permettent à ses locataires de posséder seulement que des chats, ou encore, qu’ils limitent la grosseur des chiens qu’ils acceptent. Ce type de règlement est parfaitement légal. 

Un locataire peut toutefois éviter l’application du règlement en démontrant que la présence d’un animal est requise pour des raisons de santé ou de sécurité, c’est ce qu’on appelle la zoothérapie, telle que nous l’avons vu précédemment.

Revenons maintenant à nos moutons! Ou plutôt au nombre de chiens et de chats qu’un locataire peut avoir dans son logement…

Évidemment, si un propriétaire peut limiter le poids d’un animal ou encore l’interdire, il peut en limiter la quantité.

Un propriétaire peut ainsi ne permettre qu’un seul animal à ses locataires.

Par contre, à Montréal, un locataire ne peut pas avoir plus de 4 animaux dans son logement, dont un maximum de 2 chiens.

Il est possible d’avoir un troisième chien dans certains cas, mais seulement qu’en obtenant un permis spécial.

ville.montreal.qc.ca

Dans la Ville d’Alma au Lac Saint-Jean, un seul animal est permis dans les immeubles de plus de 3 logements.

https://www.ville.alma.qc.ca/reglementation/animaux-domestiques/

À Drummondville, le nombre maximum d’animaux permis est de trois, chiens ou chats!

https://www.drummondville.ca/citoyens/reglements-municipaux/reglements-resultats/

À Gatineau, il est possible d’avoir 4 chiens ou 4 chats, pour un maximum de quatre animaux de compagnie au total.

https://www.gatineau.ca/doc-web/masson/documents/pdf/183-2005.pdf

À Sept-Îles, il est possible d’avoir 2 chiens et 2 chats par logement maximum.

https://www.septiles.ca/fr/animaux-domestiques_291/

Chaque Ville au Québec possède donc ses propres limites. 

Dites-vous que c’est tout de même mieux qu’en Chine ou un seul animal domestique est permis, soit un chien ou un chat!


Pour plus d’informations sur le droit du logement au Québec, veuillez consulter notre section sur le sujet.

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